Octobre était magnifique, comme une dernière bouffée de couleur avant la grisaille et le grand froid. Comme une première rencontre palpitante qui nous émoustille, qui nous donne l’illusion de connecter spontanément et de ne sentir que du feu. On appelle sa meilleure amie pour tout lui raconter, pour lui dire comment c’était parfait, à quel point il est beau, sexy et surtout… qu’il embrasse tellement bien ! Repartir avec une bouffée de chaleur qui nous donnera assez d’air pour supporter la grisaille d’une attente qui semblera interminable jusqu’au prochain rendez-vous… ou qui va se résumer au grand froid de l’excitation remplie d’espoir devenue soudainement le fantôme glacial d’un message qui n’arrivera jamais. Feu de paille ?
Jeux d’adultes consentants qui devraient être interdits, tellement ils font mal au cœur, mal à l’âme et surtout à l’égo qui supporte à peu près tout sauf le rejet. C’est comme un accident sportif, quand ça arrive, il faut retourner sur notre monture, et le plus rapidement possible.
Après une courte convalescence, je suis remontée sur mes talons et par le plus beau des hasards, nos regards se sont croisés. Je n’y ai vu que du feu encore une fois, mais celui qu’on allume avec du bois franc et qui nous réchauffe longtemps. J’étais intriguée par ce qu’il y avait dans son verre, un vin ambré qui me semblait liquoreux. Il m’invita à tremper mes lèvres dans ce que je considère encore à ce jour, le meilleur nectar que j’ai bu de ma vie ! C’est toujours le moment et l’expérience qui compte avant tout. Et j’avais affaire ici à un vin – et un homme – rare que je ne connaissais pas encore. C’est un vin de paille, me dit-il. On l’appelle comme ça, car autrefois on laissait les grappes de raisins sécher à l’air libre sur de la paille. Les raisins ainsi concentrent leurs saveurs qui se traduisent dans un vin capiteux, riche et enveloppé de douceur, un « moelleux » comme on l’appelle dans le langage du vin. Et c’est exactement comme ça que je me suis sentie soudainement capiteuse, enveloppée de douceur et, avouons-le, un peu moelleuse, les jambes m’ont fléchies et je me suis assise. On a discuté longtemps et on discute encore longtemps et passionnément, souvent autour d’un vin de paille. Et le feu ne s’est jamais éteint…
Maison du Vigneron Côtes du Jura Marcel Cabelier Vin de Paille 2015
Dans sa robe ambrée, le premier nez offre des notes oxydatives mêlées d’effluves de noix qui entrent en scène au fur et à mesure que le vin s’aère. Puis, la torréfaction fait une brève apparition avant de laisser place aux fruits confits et au miel. Pour cette cuvée, les meilleures grappes de chardonnay, de savagnin et de poulsard sont mises à sécher à l’air libre pendant quelques mois, puis le vin poursuivra son évolution pendant trois ans en fût de chêne. C’est aussi un vin de patience qu’on peut déguster maintenant et attendre encore au moins 15 ans.
Le vin de paille est très polyvalent car on peut le servir à plusieurs occasions au cours du repas. À l’apéro avec du foie gras ou des fromages, pour accompagner des mets relevés ou rehaussés de sirop d’érable, et même certains desserts comme une tarte aux poires ou aux pommes. Un style de vin parfait pour cette période de l’année, entre l’été et l’hiver.